Un salon incontournable des 16 et 17 novembre 2024
De la fibre au vêtement, créateurs et producteurs textiles
Les passionnés de textile du Val de Loire ont rendez-vous à Chinon les 16 et 17 novembre 2024 pour une nouvelle édition du salon Voyage Textile. Cet événement annuel est devenu un incontournable pour les amateurs du tricot, du tissage et d’autres savoir-faire textiles. Organisé dans l’Espace Rabelais de Chinon, cet événement est une véritable vitrine de l’art textile sous toutes ses formes.
Un univers de créations textiles
Le salon réunit une quarantaine de créateurs et artisans, offrant ainsi une plongée immersive dans le domaine du textile et des fibres naturelles. Dans le même temps, Voyage Textile propose des animations tricot, crochet, broderie, un atelier tricot traditionnel letton et plusieurs conférences :
« Histoire du tricot » par Christine et Michel Painsonneau,
« Histoire et évolution des costumes lettons » par Ziedite Muze et Astrid Lappuke.
L’habit en roses : une alchimie végétale
Parmi les exposants, L’habit en roses proposera aux visiteurs ses créations délicates teintées naturellement, végétalement, véritable dialogue entre une nature colorante et un monde de fibres naturelles.
Chaque pièce raconte une histoire, celle des plantes qui ont donné naissance à ses couleurs vibrantes, celle du terroir où elles ont poussé, celle de leur culture sur plusieurs mois, ou la rencontre, fortuite ou pas, de la teinturière et leur gîte… Chaque étoffe raconte son histoire, celle de la savante transformation de fibres brutes en fils puis en tissus, tricot, de l’origine immobile des végétaux à celles mobile des laines, des choix locaux d’élevage ou de culture aux voyages inévitables à la recherche de matières quasi précieuses, toujours nobles, issues d’un autre climat…
Chaque couleur, qu’elle soit douce ou éclatante, est le fruit d’une alchimie patiente, révélant les secrets d’une nature généreuse. Des fleurs au jardin aux fils à sécher, puis aux mains d’autres artisans, le parcours de chaque fibre témoigne de l’attention portée à chaque étape au processus de création de couleurs et de sa mise en habit, en écharpes, étoles, plaids…
Laissez-vous transporter dans un monde où le végétal et le textile ne font qu’un, et repartez avec une pièce unique, aux couleurs naturelles.
Histoire de branchages sur fonds de mythes anciens et d’épidémie nouvelle
Dans le charmant village de Sauxillanges, niché au cœur de l’Auvergne, il est un festival1, en juillet, qui chaque année attire les amoureux de la laine, du fait main, et des traditions ancestrales. Cette année, le Festival de la Laine a vu naître deux étranges créatures qui ont captivé l’imaginaire de tous : un homme à tête d’ours et un petit être à tête de singe, chacun façonné avec soin dans des branchages entrelacés.
Le chant des branches et des rêves
Ces figures semblaient sorties de la forêt, de la campagne ou des arbres avoisinants. L’homme à tête d’ours, imposant et mystérieux, dans sa cape de feutre gris, semblait fort, peut-être même dangereux et en même temps apprivoisé. On ne savait si c’était l’un de nous reparti à l’état sauvage ou un ours désapprivoisé, sans maître, déambulant au gré de sa fantaisie. Le petit homme à tête de singe, était plus espiègle et agile, sautillant en agitant des bras des mains et des yeux. Était-il un lutin des forêts accompagnant ou un esprit murmurant aux oreilles de l’ours…
Un voyage entre les mondes
Leur présence au festival semblait une invitation à renouer avec la nature, au-delà des brebis et béliers, présents, mais connus et en grande partie prévisibles, au-delà des animaux domestiques, à écouter le mouvement libre du règne animal sauvage, et des branches le symbolisant. Créatures éphémères, le temps d’un festival, inquiétant les petits, divertissant les passants, entrainant les moins timorés dans leur cavalcade, au son du tambourin, d’une mélodie envoutante et du chant de la flûte, avec un mélange d’admiration et de nostalgie pour ces temps où la vie était plus proche de la nature, où notre curiosité du monde nous transportait sur cinq continents à travers divers règnes, à la recherche de connaissances étranges, proches ou lointaines…
D’autres de ces êtres hybrides étaient présents, l’hiver dernier, lors du festival de la laine de Montbrun-Bocage. Ces derniers étaient couverts de feutre afin de résister aux rigueurs du froid descendant des montagnes2.
La peur en filigrane
Mais quand est-il vraiment ? Et si leur présence, sans vouloir semer la peur, n’était-elle pas l’annonce cataclysmique d’une nouvelle épidémie, mpox, fièvre catarrhale, hémorragie épizootique ?… Si l’être simiesque n’était là qu’en préfiguration d’une variole du même ordre ? D’ailleurs les couleurs et textures singulières relevées sur les habitations de Sauxillanges ne sont-elles pas les symptômes précurseurs de lésions cutanées ? Du bleu, de l’orange, du vert, du grumeleux, des encadrés, … comme autant de signaux alarmants d’une normalité biaisée, transformant par petites touches, l’environnement banal du blanc, beige, gris…
Ode à la créativité humaine
Non ! Je ne peux pas croire que ces créatures soient là pour annoncer une quelconque épidémie. Ni même entacher par une couleur la santé d’une maison ! La couleur, et j’en sais quelque chose, caresse nos âmes et nos corps, apportant avec elle des murmures de bien-être. Chaque couleur, en touches délicates, agit subtilement sur nos humeurs et nos émotions, stimulant tout au long des heures et des jours de contact et de reflet, notre santé.
Ces entrelacs de branches, ces masques, ces hommes à tête bestiale, leurs gestuelles dandinantes, réveillent en nous un inconscient collectif, des mémoires enfouies, des récits oubliés, à la recherche de l’harmonie avec la nature qui nous entoure. Ils nous rappellent que, dans ce monde actuel, il est encore possible de s’émerveiller, de croire aux histoires que nous tissons avec la laine, les branches, et les rêves.
Au Festival de la Laine de Sauxillanges, l’homme à tête d’ours et le petit homme à tête de singe bondissent et gambadent dans mon souvenir au rythme d’un week-end humide d’Auvergne, porteurs de nouvelles légendes à écrire. Il faut simplement lâcher prise et se laisser guider dans une équipée où l’art, la nature et le mystère se rencontrent pour un instant de bonheur et de magie.
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Ixtenco
Ixtenco est une municipalité de l’État mexicain de Tlaxcala. Située sur une plaine d’altitude à 2 500 m, à l’ombre du volcan La Malinche. On y célèbre son maïs, fête de San Juan Bautista – 23/24 juin, son artisanat textile, on randonne sur les flancs du volcan endormi, on déguste son mole, l’atole. Ixtenco serait le dernier bastion de la culture Otomi en Tlaxcala.
…près la Malinche
La Malinche, haute de plus de 4 400 m, est bien plus qu’une montagne. Elle symbolise l’ancêtre. Elle est représentée comme une belle jeune femme qui tisse, cheveux coiffés en tresses et vêtue du chemisier traditionnel. Elle serait l’initiatrice locale du tissage, des plissages et broderies bien particulières qu’on retrouve sur les costumes féminins portés lors d’occasions spéciales. La broderie en pepenado, de tradition otomie, consiste en de fines pointes disposées pour former des figurines, motifs floraux ou géométriques. Ces dessins ont une infinité de significations, évoquant la déesse de l’eau Matlalcueye, le nom que les anciens Tlaxcalans donnaient à La Malinche.
Pour le côté sombre, la Malinche est aussi le nom d’une amérindienne, d’origine nahuatl, née vers 1500. Esclave donnée au conquistador Hernan Cortes, elle assiste avec efficacité les Espagnols en tant qu’interprète (maya et nahuatl). Elle devint sa maîtresse puis une redoutable conseillère stratégique. Beaucoup s’accorde à ce que la Malinche a facilité la conquête de l’empire aztèque puis du Mexique par les Espagnols. Certains la considèrent comme une traîtresse à son pays et son peuple, tandis que d’autres voient en elle une victime de circonstances difficiles, cherchant à naviguer au mieux dans un monde en transformation. Au fil du temps, le nom Malinche est devenu un terme générique au Mexique pour désigner une personne qui trahit sa propre culture.
La Fibre Textile
Sous ce double patronage, la Fibre textile, association œuvrant par l’échange au développement des arts textiles et aux activités liées au travail des fibres sous toutes ses formes, a décidé en 2017, de soutenir des éleveurs ovins du village d’Ixtenco, dans un projet de valorisation de la laine. Une vétérinaire, accueillie solidairement en France par des bénévoles (éleveurs, artisans), a appris à traiter la toison (de la tonte aux fils puis au tissage, en passant par la teinture végétale).
De retour au village, elle a mis en place un projet pour la promotion de la laine en Txalcala : formation en continu, création d’un collectif de producteurs ovins, animation d’échanges commerciaux, jusqu’à la création d’un centre de formation et d’un atelier de transformation. Les besoins initiaux en matériels pour l’atelier (outils et machines pour tondre, carder, filer, teindre, récupérer l’eau de pluie, chauffe-eau solaire…) avaient été évalués par les villageois à 5 000 €.
Curso de capacitation en trasquilo de ovinos
Une première intervention eu lieu en 2018, menée par Christelle Jeannet – Séraphita, experte dans toutes ces thématiques et hispanophone aguerrie.
L’habit en roses a participé en tant que bénévole à la deuxième intervention en février 2020 (à mon retour, nous étions tous soudainement confinés…). Un défi et une expérience enrichissante pour ma pratique ! Je partais avec l’atout de ne faire des couleurs qu’avec des végétaux, le plus souvent auto-produits ou glanés. Mais il a fallu basculer dans le nouveau monde et sa botanique native. Bien heureuse de la mondialisation de la végétation : de nombreuses plantes se sont acclimatée en Europe, et je les pratiquais. Il ne fallait plus que retenir leur nom vernaculaire en espagnol. Une préparation faite de recherche en bibliothèque, de réanimation de mon espagnol plus que poussif malgré mon patronyme ibérique et de mémorisation des mots techniques de la teinture et de la transformation des fibres animales en multi-langues. J’ai cependant mon lot de boulettes, comme vouloir teindre avec des œillets d’Inde, utilisés culturellement avec d’autres astéracées pour célébrer en fleurs le Jour des Morts…
L’équipe en place désireuse de se former était entièrement féminine et avait dégagée toutes ses matinées pour cette formation collective. Christelle a ravivé les savoirs déjà abordés en 2018 : tri de la laine, lavage, cardage, puis son filage, avec un rouet financé lors de la première action, ou bien avec des fuseaux rudimentaires. Elle les a aussi initiées au feutre à l’eau à plat et en 3D.
Pour ma part, j’ai transmis les techniques de teinture végétale (avec Christelle qui a eu la lourde charge de traduire mes interventions) : mordancer, préparer les écheveaux à la teinture, extraire les couleurs des plantes, teindre, varier les concentrations, nuancer, puis réaliser les ultimes finitions.
¡Colores para México!
La régularité des présences, et progressivement les départs de plus en plus tardifs, des stagiaires, jusqu’à finalement passer les journées entières dans la cour aux divers ateliers, ont démontré la prise de conscience au fil des jours que la diversité et l’harmonie des couleurs naturelles, au delà de sa beauté, avait aussi un intérêt économique.
Pouvoir réaliser des produits colorés et attractifs valorisant leur laine jusqu’alors inexploitée. Pouvoir utiliser des ressources végétales locales, gratuites pour produire en autonomie des vêtements et des accessoires source de revenus complémentaire. C’est avec joie que Christelle et moi, avons pu observer leurs sourires, leur curiosité et leur application croissante à filer, teindre, feutrer tout au long de la journée… Notre but était atteint !
Et c’est un plaisir inoubliable que de produire des couleurs sur des laines beiges ou grèges, que d’entendre les exclamations enthousiastes du groupe à chaque sortie de bain, d’apporter toutes ces couleurs pour participer à l’univers si coloré de la vie mexicaine.
Merci à Norma, Christina, Violetta et toute la famille pour l’accueil, à Christelle, à Elisa, Alberta, Diega, Berta, Guillermina pour leur participation et à tous les sourires partagés
Una bolsa de cochinillas para regalar
A la fin de ce merveilleux séjour, elles m’ont offert un sachet de cochenilles de Oaxaca, dont j’utilise encore régulièrement des pincées pour produire du fuchsia ou dynamiter la couleur de ma garance. J’ai aussi reçu une jolie broderie, offerte par nos hôtes. Elle est ornée, d’une belle fleur de chrysanthème sur un carré de coton. Je crois bien qu’elles non plus n’imaginaient pas que ce chrysanthème, si beau soit-il, me ramenait quand même un petit peu à la Toussaint, notre fête des morts…
Les 1er et 2 décembre 2023, la petite commune de Montbrun-Bocage, nichée au cœur du Volvestre, a vibré au rythme de la 10ème édition de ses Journées de la Laine1. Cet événement, qui célèbre l’artisanat traditionnel et met en lumière le riche patrimoine local, a connu un succès sans faille, attirant des visiteurs et des exposants venus de loin pour découvrir et partager la magie de la laine et participer aux festivités.
Le patrimoine ancien de Montbrun-Bocage participe à l’atmosphère chaleureuse et accueillante des Journées de la Laine. Les petites voies, presque orthogonales, les maisons aux volets colorés, la pierre saillant ici et là, le ciel de tuiles canal offrent un cadre pittoresque à l’événement au cœur du village. Les visiteurs sont transportés dans une époque révolue, où la modernité traine les pieds, pour apprécier des activités traditionnelles et modernes axées sur la durabilité et la préservation des savoir-faire.
Un moment fort de cette édition a été le défilé des hommes-animaux, une cavalcade singulière qui a captivé l’imaginaire du public. Les participants, vêtus de costumes évoquant des créatures fantastiques, ont déambulé, en musique, dans les rues du village, arborant des masques en feutre d’une grande finesse. Ces œuvres d’art artisanales, conçues avec créativité2, ont apporté une touche de mystère et de magie à l’événement, amenant les spectateurs dans un monde féérique où la laine devient source d’inspiration.
Le défilé n’était pas seulement une démonstration de l’habileté des artisans, mais aussi un hommage à la riche histoire de Montbrun-Bocage. L’association entre les hommes-animaux et la laine a des racines profondes dans le tissu social de la communauté, symbolisant l’union entre l’homme et la nature, entre la tradition et la créativité.
Dans ce cortège, les hommes à tête d’animal incarnent-ils des archétypes, des symboles gravés dans l’inconscient collectif, réveillant des mémoires enfouies, des récits oubliés, pour rétablir l’harmonie avec la nature qui nous entoure. Les danses et les masques se fondent dans un langage universel, un dialogue entre le visible et l’invisible, entre le terrestre et le céleste.
Le cœur de la fête battait également au rythme de la belle halle centrale de Montbrun-Bocage. Cette structure emblématique a servi de toile de fond aux nombreuses présentations. Sous sa protection, les étals débordaient de produits en laine, des écharpes douillettes, des chaussettes ou bonnets et de nombreux habits de laine, cousus, tricotés, tissés ou feutrés, des chapeaux, des bérets, des tentures, des tapis, de la matière brute et à transformer, de la laine dans tous ses états, créant un marché vivant et coloré. Les artisans ont présenté leur savoir-faire, échangeant leur histoire avec les visiteurs et les entrainant ainsi dans un monde de textures, de couleurs et de techniques.
Et le dimanche matin, l’hebdomadaire marché de plein air, réunissant producteurs locaux, bio, artisanat et cuisines du monde, est venu se joindre aux Journées de la Laine. Un autre lieu de rencontres et de discussions improbables, alternatives et engagées. Un monde bigarré, bienveillant, naturel et doux…
Les Journées de la Laine à Montbrun-Bocage ont réaffirmé l’importance de célébrer l’artisanat comme un héritage précieux. En ramenant la laine au premier plan. Cet événement souligne la polyvalence de cette matière naturelle tout en rendant hommage aux compétences artisanales qui ont façonné la communauté au fil du temps.
Clap de fin à Montbrun-Bocage, les visiteurs sont partis, les stands déserts et bâchés.
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1 – Les organisateurs des Journées de la Laine : association Atoutlaine – 31310 Montbrun-Bocage – valorisation et développement de la filière laine en Midi-Pyrénées notamment via des études sur cette filière, des formations en lien avec la laine, l’organisation d’événements de promotion de la filière, la conception et réalisation de produits à partir du matériau laine. 2 – Feutre Formation France – 31310 Montbrun-Bocage
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